L'interview de Samuel Boulesteix

 

 

Saujon, le 28/07/2016

 

pour

par Ric33

Discussion sur le forum d'Objectible...

Chris, Jean-Luc (Yoda) et moi-même avions pris rendez-vous avec Samuel Boulesteix ce jeudi 28 Juillet pour réaliser l’interview de celui qui venait de gagner le trophée OBJECtible de la plus belle pièce para-BD 2015 avec son Gaston endormi.

A notre arrivée à Saujon, petite commune proche de Royan et après 2h de route, nous sommes reçus par Samuel et sa femme Claire où nous attend un petit café de bienvenue.

Les choses sérieuses commencent rapidement avec la visite de son atelier situé au sous-sol de sa maison.

Après une première visite de ce dernier où nous découvrons le Gaston et le Lucky Luke (essai de patine non retenue), nous passons au petit salon privé du sous-sol, jouxtant l’atelier pour démarrer l’interview…


Lucky Luke : essai de patine non retenue.

Ric pour Samuel, peux-tu rapidement nous parler de ton cursus professionnel ?

Samuel - J’ai passé un BAC A3 (littéraire et art plastique), puis je suis allé à la Fac (Talence - Arts plastiques - 1992) mais j’ai trouvé l’expérience très décevante ; j’y suis resté à peine une année car je me suis attaqué à un projet qui m’a beaucoup plus amusé qui consistait à faire une boite de nuit gothique avec les moyens du bord. On était huit potes, filles et garçons. Au départ c’était un lieu sordide qui avait été squatté, il y avait vraiment tout à y faire. On s’y rendait l’après-midi et on y restait jusqu’à 3h du mat au début, puis on a poussé à 4h puis 7h du mat ! Et donc à force forcément, les bancs de la Fac c’est devenu compliqué !

Cette expérience fut fondatrice car on a fait des trucs incroyables sur 120 m2 ! c’était conçu comme une grotte avec des stalactites, des créatures dans tous les sens et des niches à thème selon que c’était le bar, les vestiaires ou la cabine destroy du DJ. On s’est bien marré.

Je me suis dit qu’autodidacte m’irait mieux qu’étudiant… alors adieu la fac !

A partir de 1992, il y a eu une vaste période d'expérimentation qui a vu s'enchaîner toutes sortes de créatures improbables, des nus comme des objets déco et quelques ovnis à très faible tirage. Une période bénie, bercée par les Métal Hurlant, Mad-movies, Stan Winston, ILM, Giger, Möebius et surtout Phil Tipett... une de ces époques où tout est prétexte à tenter quelque-chose. Toutes mes sculptures furent éditées par la société Skull-t qui ouvrit ses portes en 1992. J'ai lancé mes 4 premières sculptures de Para-BD avec les éditions Skull-T en 2000-2003. Mais l'atelier a été contraint de cesser son activité m'obligeant alors à franchir le cap en me lançant dans l'autoédition.


Sculpture de Antoine-Louis Barye


Sculpture du Rancor réalisée par Phil Tippet

Ric pour Comment t’es venu le goût de la sculpture ?

Samuel - Cela m’est venu dans ma post-adolescence.

Je m’achetais des figurines en plomb que je peignais, puis j’ai commencé à leur faire des petits décors (des dioramas) jusqu’au moment où je me suis dit : « Tiens je vais sculpter un décor pour agrémenter et là, surprise, ça venait tout seul, facilement ».

Donc j’ai commencé à faire des choses faciles, des masques principalement.

J’aimais bien dessiner à l’époque mais la découverte du modelage m’a fait jeter mes crayons pour ne jamais y revenir. Je décrétais à 17 ans que le dessin c’était vraiment pas mon truc, que ça sera la sculpture. La passion avait parlé.

A l’époque, j’habitais un patelin qui s’appelle Semussac. Il faut y être passé pour comprendre qu’à part peindre des figurines dans sa chambre… il n’y avait pas grand-chose à faire.

Ric pour Quels sont les matériaux que tu utilises ?

Samuel - Je suis un petit peu mono-maniaque : c’est toujours argile, plâtre.

Et après concernant le moulage, c’est de la résine, de la cire, du bronze.

Ric pour Qu’est-ce qui est le plus difficile dans la sculpture pour toi ?

Samuel - Difficile à dire. Je pense vraiment que c’est dans les tournures que ça se joue, on ne le voit pas venir. En tout cas les défis ne manquent pas à chaque nouveau projet.

Ric pour Comment travailles-tu ? As-tu besoin de calme ? Travailles-tu en écoutant de la musique ?

Samuel - Oui tout le temps ! J’ai ma chaîne qui n’est jamais loin. Soit je suis sur France Inter, soit je me fais une playlist pour la journée avec des albums en tous genre ou des interviews d’auteurs podcastés.

Et puis ma femme est là pour me raconter les potins…

Sinon, je fais forcément des pauses car je suis aussi fabricant, ce qui veut dire être un peu partout ; disons qu’autant que possible je cherche des plages de travail qui soient les plus longues possibles.

Ric pour Lorsque tu es sur une pièce, combien d’heures passes-tu pendant la journée, en moyenne ? Et peux-tu nous parler des différentes étapes de la création et de la réalisation d’une pièce ?

Samuel - Si l’on prend Gaston comme exemple, ça s’est étalé sur pile un an entre le moment où on s’est dit « Et si on faisait un Gaston » et le moment où j’ai livré le dernier exemplaire ! c’est fastidieux mais là j’étais tout seul (ce qui ne va pas être le cas pour les pièces à venir car on passe à trois).

Plus généralement, cela commence par évoquer des dessins, discuter avec Fabien (éo) et Hervé (BD Flash) sur la base de visuels que j’aime bien a priori. On extrapole, on débat, de sorte que le projet devienne stimulant, et une fois que l’on tombe d’accord, je commence par imprimer une série de dessins dont certains à l’échelle de la future sculpture. A ce stade, je me gratte la tête un bon moment pour réaliser une armature qui anticipera tous les problèmes que je vais avoir à régler.

Pour revenir sur le projet « Gaston », l’armature à elle seule m’a pris 15 jours, j’y suis revenu souvent, me disant que j’aurais peut-être besoin, en cours de route, de changer la position du bras ou de vouter davantage son dos, etc. il fallait que ça puisse rester évolutif. La qualité de l’armature conditionne les proportions que le personnage aura lorsque je vais y poser l’argile, c’est déterminant comme étape.

La récompense de ce travail préparatoire c’est que lorsque l’armature est bonne, le modelage devient fluide et dynamique. J’ai pu modeler Gaston en deux semaines.

2° phase : la validation par les ayant-droits.

Sur présentation d’une vidéo du modelage, les ayant-droits ainsi que quelques personnes sur le forum OBJECtible ont évoqué des petits soucis de « tassement » de son buste et d’erreur dans la longueur des pieds. Cependant à ce stade, je ne pouvais pas intervenir dans l’argile à cause de l’armature qui est dedans, il fallait attendre l’étape suivante (le moulage en plâtre) car c’est dans le plâtre qu’il devient possible de donner des coups de scie.

3° phase : moulage du plâtre.

Après avoir redonné 3 cm à son torse et 2 cm à ses pieds, notre Gaston était revenu à des proportions normales (il faisait « nabot »). Seulement voilà, il était en 5 morceaux à présent, donc impossible à refaire valider. J’ai donc travaillé les emboitements avec deux paramètres en tête : D’une part le prototype en plâtre devait pouvoir être présentable en photo à tout moment, et de l’autre, chaque système d’emboitement devait pouvoir fonctionner 50 fois de suite lorsqu’ils seraient reproduits en série.

4° phase : prototypage.

C’est l’étape d’optimisation du prototype avant le moulage en série.

Sur Gaston, J’ai repris les emboitements de chacune des 5 pièces une par une en m’assurant bien que ça fonctionnerait 50 fois d’affilée (oui c’est véritablement une obsession à ce stade). J’ai sculpté des formes mâles et femelles pour les emboitements du cou et de la main droite, et un système d’enfilade de tiges filetées en acier dans des tubes en cuivre qui couraient du bassin à la plante de ses pieds (car il fallait aussi résoudre en série les renforts de ses maigres jambes, et de ses chevilles).

A la fin, j’ai pu remonter le prototype entièrement grâce aux emboitements et à un astucieux aimant dissimulé dans sa manche. C’était reparti pour une nouvelle validation.

Pour connaitre la suite sur l’étape de la patine, je vous renvoie à l’interview que j’ai donnée à éo...

Ric pour Est-ce que tu rencontres d’autres sculpteurs ? Echanges-tu avec eux ?

Samuel - Je sollicite des amis sculpteurs et dessinateurs depuis longtemps, et depuis peu j’accorde aussi une oreille attentive aux collectionneurs et amateurs du genre. J’écoute les critiques constructives bien sûr, mais aussi les critiques râleuses ou même cyniques, car elles racontent toutes quelque-chose… j’entends souvent de la déception derrière les traits d’humours ou les saillies, je prends cela comme un mystère à percer ! [rire]…

J’ai une complicité de déjà 15 ans avec Fabrice Lebar (sculpteur, fondeur d’art et formateur). Outre les nombreuses pièces qu’il m’a fondues et merveilleusement patinées, je vais souvent le voir lorsque j’ai un « nœud ». C’est lui par exemple qui a trouvé la solution pour les mèches de Gaston (Cf. interview éo sur Gaston).

J’ai un échange régulier avec Christophe Coronas (alias Cécil) qui chausse volontiers sa casquette de prof de BD pour m’aider à saisir des subtilités graphiques ou à approfondir mes connaissances sur le style d’un auteur (il a enseigné à l’école d’art … ???...de Bordeaux). Ses coups de main sur Lucky Luke furent tellement pertinents que nous avons décidé de travailler régulièrement ensemble à l’avenir. Vous aurez l’occasion de voir ces dessins dans de futures rétrospectives.

J’ai un merci tout particulier à faire à Nico alias « Absurdtoys » qui m’a filé de précieux tuyaux pour améliorer mes patines. Allez voir ce qu’il fait, c’est étonnant.

Il y a aussi Mehdi Gasnier que je remercie grandement pour son œil de lynx et ses contre-propositions qui m’ont sorti plusieurs fois de moments de blocage. Un sculpteur que je vous conseille de suivre via son facebook…

Ric pour Parle-nous un peu de tes dernières réalisations. Quelle a été la plus difficile à réaliser ? Quelle est celle que tu préfères ?

Samuel - La plus difficile ? Et bien j’aurais tendance à penser à celle qui n’est pas là et qui a fini en boule ….Cette satanée Kriss de Valnor !

J’ai passé deux mois dessus jusqu’à me résoudre à abandonner. Je ne la trouvais pas. J’avais rassemblé des dizaines d’images d’elle, mais aucune synthèse ne se faisait dans mon esprit, c’était comme de voir 10 frangines... Impossible de voir UNE seule Kriss. Ça a été cuisant de la détruire après l’avoir frôlé bien des fois. Mais bon, faut pas déconner, quand c’est « presque », ça demeure à coté.

Je la referai un jour… j’aurai ma revanche !

[Aparté de Ric : Cela me fait penser à une célèbre pub : « Je l’aurai un jour, je l’aurai... »]

Ric pour Et celle que tu préfères ? 

Samuel - Ma chouchoute c’est le buste de Champignac sur son trépied. L’esprit de Franquin devait rôder dans les parages ce jour là car nous parlions technique de soclage avec Fabrice Lebar (en vue de la fonte en bronze à venir) quand la conversation s’est mise à tourner à la rigolade sur des socles improbables et farfelus … et c’est là qu’est venue l’idée du pied de porte-manteau. Nous nous sommes bien amusés à « brainstormer » sur ce pas de coté, et finalement deux mots sont restés en boucle dans ma tête suite à cette conversation : « déjanté » et « naphtaline ». Ils m’ont porté jusqu’à la fin et ont contribué je pense à lui donner cette étincelle de folie qui ne quitte pas son regard comme sa présentation.

Cette expérience fut fondatrice car elle m’a convaincu qu’il était possible, dans certaines circonstances, de pousser l’expérience jusqu’à se mettre dans l’esprit de l’auteur, et ainsi, de jouer avec les tournures de la sculpture comme il l’aurait fait sans doute s’il l’avait sculpté lui-même. Je ne crois pas qu’un auteur facétieux comme Franquin aurait eu une attitude de pur copiste s’il avait sculpté ses propres personnages.  C’est également ce que m’ont poussé à faire des auteurs comme Guérineau ou Guarnido (cf. le Stryge et Blacksad) en m’invitant à m’approprier leurs personnages.

Ric pour Comment choisis-tu les personnages de tes statuettes et le visuel ? Au départ c’est plutôt une demande de l’éditeur ou est-ce un choix personnel ?

Samuel - En général ce qui va me faire me décider c’est le sentiment que je tiens une forme « statufiable ». Après, je pense que tout est bon pour y arriver :  bien sûr il faut feuilleter les albums, regarder du côté des ex-libris, mais pas seulement. A chaque fois que je peux, je cherche d’autres influences, je rempli mon petit panier d’idées secondaires pour forcer mon esprit à ne pas entreprendre tout au premier degré, à ne pas être trop « prisonnier du modèle ». Mettre le projet en perspective aide à cela, comme de retrouver les influences de l’auteurs, ou de convoquer l’histoire de l’art afin de voir si des connections sont possibles. Par exemple, pour imaginer le buste de Blacksad, j’ai d’abord fait un détour par les sculptures de panthères de style « années 30 » je trouvais inspirante l’idée que John Blacksad ait pu être sculpté par un artiste de son époque.

Tout ne rentre pas dans le langage sculptural, c’est pourquoi avec éo et BDflash nous débattons beaucoup du réel apport qu’aura telle ou telle option sur la sculpture finale.

Ric pour Tu ne pourrais pas envisager de faire une sculpture à la Fariboles où un personnage est en équilibre, en suspension ?

Samuel - Les équilibres qu’on trouve dans les statuettes de Pascal Rodier sont subtilement composés et en deviennent très sculpturaux . Il y a pas mal de figurines qui tombent dans l’anecdote à force de gesticulations et de poses outrées, mais pas les siennes. Encore une fois, il ne suffit pas qu’un dessin soit génial pour qu’il devienne tout aussi génial en volume ! et à ce jeu-là, Les scénettes sont les plus casse-gueule. Dans la BD Blacksad par exemple, à un moment il y un dessin en pleine page où la caméra est au plafond avec john Blacksad vautré sur un canapé avec le cadavre d’un tueur à coté de lui. Ce point de vue cinématographique casse la baraque, mais de là à croire qu’en volume la scène gardera son effet… c’est perdu d’avance.

Oui, Je pense que je viendrai à des poses plus dynamiques l’année prochaine, notamment lorsque je réaliserai le duo de Valerian et Laureline, qui seront certainement présentés sous forme de scénette.

A suivre donc…

Ric pour Comment se passe les échanges avec les ayant-droits, l’éditeur, le commanditaire ? Par téléphone, mails, rencontres ?

Samuel - Comme on forme un trio avec éo et BD Flash (Hervé Legall), on est les trois signataires d’un contrat par rapport à nos interlocuteurs Dargaud et Mediatoon. Ils nous demandent d’être un seul interlocuteur à chaque fois et toujours le même, pour éviter d’avoir des effets de ping pong . Donc du coup, c’est toujours Fabien (éo) qui s’en occupe. Il collecte tous les avis et les transmet le plus souvent par mail ou bien en allant les voir.

C’est le messager, celui à qui on coupe la tête si jamais ça ne va pas [Rires…]

Ric pour Peux-tu nous parler de tes projets en cours ou de tes futurs projets ?

Samuel - Quelques mots sur le Spirou (à venir…).

Je vous montrerai tout à l’heure les dessins que Christophe m’a fait.

Nous avons opté dès le départ pour une pose qui nous plait collégialement et où Spirou sera représenté en train de réfléchir tout en marchant. J’ai fait appel à l’aide graphique de Christophe Coronas [Cécil] dès le démarrage (Pour Lucky Luke, Christophe était intervenu sur des corrections). Une légère touche de réalisme comme un choix radical dans le traitement des matières, viendront je l’espère lui donner un traitement à la fois « statuaire » et art-déco. Mais cela reste à tester.

Ric pour Et c’est tiré d’un visuel ?

Samuel - Oui, c’est tiré d’un visuel existant, dans Z comme Zorglub, où il est en train de réfléchir à haute voix, tout en étant suivi par Fantasio au moment où ils sortent d’un parc. Il a une main dans la poche et l’autre sous le menton – enfin pas tout à fait car il fait un geste en même temps -  car il réfléchit tout en allant de l’avant… Comme ça ! [Samuel mime la posture …]

Ric pour Il t’arrive parfois de modifier le visuel pour la posture afin que ce soit plus représentatif ?

Samuel - Oui parce que Franquin sur-joue tout le temps la face visible du dessin mais, si l’on pouvait passer derrière le personnage, on se retrouverait avec des angles faibles. C’est vraiment un travail de sculpteur que de savoir traiter tous les angles de vue de façon équilibrée. Ceci dit, booster un angle pour le rendre plus fort, est aussi souhaitable en sculpture, faut juste pas négliger le 360° pour autant.

Pour Spirou, l’aide de Christophe s’avère très précieuse car ses dessins sont déjà dans l’appréhension du 360°. C’est un travail comparable à un « model sheet » pour l’animation.

 

Ric pour Parle-nous de ta collaboration avec éo, le premier contact.

Samuel - Premier contact : Fabien Rondeau (éo) m’a appelé pour me proposer une collaboration.

J’étais en train de lancer le Hébus (version 2012) à compte d’auteur et son appui était super bien venu car je ne me voyais pas vendre les 45 exemplaires à moi seul. On s’est donc partagé la promotion de cette pièce. Il en a vendu de son côté, moi du mien, ça a été une bonne collaboration. Quand Hervé Legall (BDflash) m’a contacté pour réaliser des projets para-bd, je lui ai aussitôt proposé qu’on forme un partenariat à trois avec éo, et ça l’a fait tout de suite ! Après 4 ans de recul, je peux dire que suis très heureux car notre trio fonctionne dans une bonne complémentarité, aussi bien humainement que professionnellement.

Ric pour As-tu déjà refusé des projets ? Si oui, lesquels ? As-tu déjà réalisé des prototypes de statuettes qui sont tombés à l’eau ?

Samuel - Il m’est en effet arrivé de refuser des projets. Il y en a un en particulier que j’aimerais vous raconter.

En fait, c’était moi qui en était à l’initiative, c’était en 2005. Je venais de terminer la sculpture du Stryge, en complicité avec Guérineau et Corbeyran. Tout s’était très bien passé artistiquement parlant mais quand il s’est agi de la lancer commercialement, comme je n’avais pas de réseau, j’ai cherché à convaincre quelqu’un qui en avait.  J’ai proposé à Frédéric Bosser (Galerie Bosser de Paris ) de produire le projet. Il m’a dit :« Pourquoi pas. Laisse-moi un exemplaire pour que je teste la réaction de mes clients »

Mais un an plus tard, rien n’avait bougé [Soupir de Samuel] …. C’est long un an quand on est pressé de lancer un truc... J’étais vraiment ric rac à l’époque mais au bout d’un an à le relancer il a fini par abandonner et m’a renvoyé sur quelqu’un d’autre, un certain Shakir. Le gars m’a proposé de me l’acheter la moitié du prix que j’en demandais…J’avais sacrément besoin de cet argent mais j’ai refusé quand même.

Ce fut dur à digérer, mais j’ai su à cet instant que cette décision était un tournant dans ma vie.

Je me suis remonté les manches, j’ai arrêté d’avoir peur de… je ne sais trop de quoi d’ailleurs, et me suis promis qu’à partir de maintenant je ferai tout par moi-même. Il faut croire que la chance aime bien ce type de promesse car j’ai obtenu une bourse d’aide aux jeunes entrepreneurs par la mission locale (3000€ je me rappelle) que j’ai optimisée à mort pour pouvoir produire les 12 exemplaires. Au final, j’ai tout vendu et je me suis dit : « Putain que j’ai bien fait de lui dire non ». Comme quoi parfois, c’est juste une histoire de combat contre ses peurs.

Concernant des protos de statuettes qui sont tombés à l’eau, il y en a eu « Honorata », une des épouses que l’on trouve dans la Caste des Métabarons. Je l’avais proposé en souscription pour une petite série de bronze 8+4 (en fonderie d’art) mais je n’ai eu que 2 souscripteurs… J’ai donc été obligé de laisser tomber.

 

Ric pour Tu fais tout, tout seul : sculpture, moulage, etc… N’as-tu jamais pensé à avoir un collaborateur ou agrandir ton entreprise ?

Samuel - Si, si, j’y ai tellement pensé que c’est fait ! Je vous annonce officiellement que la SAS Boulesteix Collection vient de voir le jour. On sera trois avec ma femme Claire et bientôt un employé.

Ric pour Peux-tu nous dire à l’heure actuelle si tu vis bien grâce à ton activité et si tu n’as aucun regret par rapport à ce que tu aurais pu imaginer en te lançant dans ce métier ?

Samuel - Aucun regret ! Les choses ont mis du temps à se mettre en place, parfois avec des retours en arrière, des déceptions, mais aujourd’hui je suis très heureux, bien entouré.

Mener ma vie d’artiste en harmonie avec ma petite famille est un sens que je donne à ma vie.

Chris pour Sur le projet Blacksad , est-ce que tu as encore des décisions à prendre sur la réalisation ou est-ce qu’il est ficelé ?

Samuel - Le modelage de Blacksad est validé. L’idée de mettre des moustaches a été évoquée, pour moi, vu le style que j’utilis,e rajouter des moustaches risquerait de faire gadget. Prenez dix bouquins sur l’art animalier en bronze ou en terre cuite et trouvez-moi un seul félin représenté avec des moustaches ! Je vous mets au défi tiens !!!

 
Correction des oreilles

Ric pour Lis-tu des BD ? Lesquelles ?

Samuel - Je lis un peu de tout, surtout les BD autour des projets que je fais. Je n’ai pas de BD préférentielles même si je kiff particulièrement les histoires de Jodorowsky. N’ayant pas de librairie spécialisée à proximité, c’est souvent les copains qui m’en conseille, ou bien je vais sur BDGEST pour m’inspirer.

Ric pour Quels sont tes goûts cinématographiques ? Y a-t-il des personnages issus du grand écran qui ont pu ou qui pourraient t’inspirer ?

Samuel - Ado oui, mais plus trop maintenant. J’ai beaucoup lu le mag « Mad Movies », et comme pas mal d’émules, j’ai eu envie de reproduire du Stan Winston, du Rick Baker et autre Phil Tipett. Mais Hollywood est loin de chez moi alors qu’Angoulême est à une heure de route ! [Rire]

Ric pour Es-tu collectionneur ?

Samuel - Non ! Je ne suis pas collectionneur du tout.

Ric pour Que penses-tu des collectionneurs qui peuvent dépenser des sommes astronomiques afin d’assouvir leur passion ?

Samuel - [petit instant de réflexion de Samuel...] Que du Bien !

[S’ensuivent des éclats de rire bon enfant]

Le collectionneur est assez fou d’acheter ce que je suis assez fou de faire, donc on va bien s’entendre… [Rires à nouveau]

Ric pour As-tu d’autres passions que la sculpture ?

Samuel - Je n’ai pas trop le temps pour une autre passion. La sculpture c’est déjà bien chronophage.

Ric pour Comment as-tu connu OBJECtible ? 

Samuel - La première fois que je suis arrivé sur ce forum, je n’ai pas compris comment ça fonctionnait.

Je voyais tout le monde parler de tas de trucs dans tous les sens, sans retrouver le fil directeur… des textes bourrés d’émoticons s’accompagnaient de petites annonces à la recherche de figurines sans jamais qu’on en revienne au sujet de départ !Bbref, forum et moi ça faisait deux.  [Rires de Chris , Yoda et moi-même]

Bon maintenant, ça y est ! J’ai compris à peu près comment un forum fonctionne, je suis à même d’aller lire ce qui m’intéresse.

Ric pour Tu viens de gagner le Trophée OBJECtible avec le Gaston. Un commentaire ?

Samuel - [Rires de tous] Non, ça fait plaisir !  je n’ai jamais gagné de prix et quand j’ai vu celui-là se profiler à l’horizon, ça m’a donné envie de l’avoir, oui !

Ric pour Nous terminons cette interview par le petit jeu du « Si j’étais »...

Ric - Si tu étais Tintin, Spirou ou Astérix ?
Samuel - Astérix

Ric - Zorglub, Gargamel ou Olrik ?
Samuel - Zorglub

Ric - Milou, Idéfix ou Spip ? 
Samuel - Idéfix

Ric - La Porsche de Ric Hochet, La dauphine de Gil Jourdan ou La Turbotraction ? 
Samuel - La Turbotraction (mais je ne suis pas trop bagnole)

Ric -Dessinateur, Scénariste ou Coloriste ? 
Samuel - Coloriste

Ric - Si tu étais un personnage de BD ? 
Samuel - Gaston [après une longue réflexion]

Ric - Un sculpteur ? 
Samuel - Barye (sculpteur animalier)

Ric - Une BD ? 
Samuel - Combat ordinaire

Ric - Un animal de BD ? 
Samuel - [Gros blanc…… Samuel sèche…………] Un sanglier dans Astérix !!!

Ric - Une voiture de BD ? 
Samuel - Un Tacot ……Je pense à ma vieille Carina de 1994 dont je n’arrive pas à me séparer ! Donc je dirais la vieille Fiat 509 de Gaston

Ric pour Et enfin ta pièce coup de cœur de ces 10-20 dernières années ? 

Samuel - Un buste exceptionnel de Arzack en bronze que j’ai vu en photo il y a longtemps je ne sais plus où. Il aurait été sculpté par un certain Yen.  Ha ! et puis l’année dernière le « Long John Silver » et le « Siegfried » vu par Christophe Charbonnel, je suis archi fan.

 

Ric pour Merci Samuel pour ton accueil chaleureux et ta disponibilité.

Nous repartons en direction de Bordeaux après une journée riche en échanges, des images plein la tête et, en disant au revoir à nos hôtes, je ne peux m’empêcher en passant devant la vieille Carina de Sam de lui lancer : « C’est vrai qu’il serait peut- être temps d’en changer, non ? »